Mission décembre 2013

Compte rendu mission au Laos du 16 au 23 décembre 2013

(Vincent Compère)

Retrouvailles avec Phothivanh qui fidèle à son habitude arrive à la guesthouse Sounaphone le matin pour me véhiculer. Je revois avec beaucoup de plaisir Palamy. Manikéo et Viengsavanh sont absentes en début de semaine pour des raisons familiales totalement différentes (obsèques du père de Manikéo et mariage de la fille de VienghSavanh). Les repas du midi se font au bloc, organisés par Vanhpheng. Enfin, il faut encore une fois saluer la disponibilité de l’ensemble des MAR et des liens uniques qui se sont créés entre les missionnaires de l’AFRASE et les MAR laotiens. A ce titre, j’ai eu l’honneur d’assister au mariage de la fille de Viengsavanh : un seul mot grandiose (entre 300 et 500 convives).

Enseignement

Je rencontre pour la première fois les 3 étudiants : Mme Vanhpheng NORASINGH et Mr Sisongkham PHANMANY de l’hôpital Mahosot et Mr Phouvang THONNARETH de l’hôpital mère et enfant. Les étudiants sont enthousiastes et motivés.

Pratique (4 jours à Mittaphab et 1 journée à Mahosot)

L’activité était moins importante que d’habitude pour cause de saison des mariages et fêtes multiples. Les chariots donnés par l’AFRASE pour supporter de façon très astucieuse les échographes (merci André) permettent une ergonomie maximum pour la réalisation des gestes. Il ne semble pas y avoir de problème d’approvisionnement pour les aiguilles d’ALR et de Bupivacaine.

Les gestes ne sont pas encore assurés et la connaissance des réglages de la machine n’est pas encore parfaite. La sonanatomie commence à être acquise mais doit être rappelée à chaque fois. À noter une dispersion, voire une disparition quelques fois, de Phouvang, le médecin de l’hôpital mère et enfant. Avec Photyvanh, nous lui expliquons l’importance d’être totalement disponible au bloc. Après cela, les choses évoluent un peu plus favorablement. Au début de la semaine, Phothivanh avait quelques réticences à encadrer les étudiants qu’il considère plus comme des collègues que comme des élèves. Après discussion, il a encadré quelques ALR avec beaucoup de maitrise et de pédagogie.

Gestes réalisés

Photyvanh (il est vraiment devenu expert en ALR)

Nous avons fait des choses qu’il ne fait pas habituellement :

  • 1 KT périnerveux iliofascial pour une fracture du fémur chez un sujet jeune.
  • 1 bloc infraclaviculaire
  • Bloc mandibulaire
  • BAX et TAP bloc
  • Bloc sciatique (en diminuant par 2 le volume qu’il injecte habituellement)
  • Rachianesthésie unilatérale

Vanhpheng

  • BAX
  • Bloc iliofacial
  • Bloc fémoral
  • Bloc ilohypogastrique
  • APD
  • Rachianesthésie unilatérale

Sisongkham

  • BAX
  • Bloc Fémoral
  • Bloc sciatique
  • BIS
  • Bloc supraclaviculaire
  • Rachianesthésie unilatérale

Phouvang

  • bloc sciatique
  • BAX
  • Bloc iliofascial
  • Tap bloc
  • Rachianesthésie unilatérale

Manikéo : à noter que Manikéo a tendance à s’imposer par rapport au groupe et à monopoliser les gestes techniques au dépend des 3 nouveaux étudiants. Cela amène à quelques tensions dans le groupe. J’ai dû intervenir à plusieurs reprises pour la canaliser.

  • Tap bloc
  • BAX
  • Rachianesthésie unilatérale

Théorique

  • APD
  • Pharmacologie des anesthésiques locaux
  • Tap Bloc
  • Révision de l’ensemble des blocs du plexus brachial

Evaluation

A plusieurs reprises, j’ai interrogé les étudiants pour connaître leur niveau de connaissance. Celui ci est encore fragile :

  • la pharmacologie des AL commence à être connue avec un message simple : bloc anesthésique = Bupivacaine à 0,25%, bloc analgésique Bupivacaine à 0,1-0,125% (Manikéo fait des tap bloc bilatéraux avec un volume total de 40 ml avec la bupivacaine à 0,25 % quel que soit le poids).
  • Anatomie nerveuse : encore très fragile
  • Sonanatomie : celle-ci pour les blocs usuels commence à être acquise
  • L’indication des blocs : encore fragile

Asepsie

Dès le premier jour, l’asepsie laisse à désirer malgré le rappel de la mission précédente présente 15 jours avant…… Le lavabo de la salle d’ALR n’a même plus de savon et le torchon immonde de saleté est revenu à sa place malgré la désapprobation exprimée la dernière fois par Jacques. Cela permet de rediscuter avec Phothivanh et l’infirmière de salle de réveil l’importance que revêt la propreté des mains dans les actes médicaux. Je mets à disposition un flacon de solution hydro alcoolique et leur explique (plutôt Ré explique) les modalités de lavage des mains. L’infirmière récupère la solution de bétadine de lavage des mains des chirurgiens et la met dans un ancien flacon de SHA et le laisse à disposition sur le lavabo. Le torchon a disparu et les MAR se sécheront les mains avec des compresses sèches. Nous décidons avec Phothivanh d’utiliser des gants stériles pour la réalisation des ALR non seulement pour les mains des MAR mais aussi pour recouvrir la sonde d’échographie. Je reste très vigilant sur l’ensemble de l’asepsie toute la semaine et demande à l’infirmière de la salle de réveil d’être la garante des bonnes procédures d’asepsie (cela a l’air de marcher, en tout cas en ma présence ….).

Pour essayer d’obtenir des solutions hydro alcooliques pour les 2 hôpitaux, nous faisons avec Phothivanh et Vanhpheng un lobbying sur l’ensemble des administratifs. A Mittaphab, soutenu par Quentin Mouronval (élève directeur français en stage), le directeur que j’ai rencontré semble conscient de l’importance de cette acquisition et s’engage à fournir en priorité le bloc opératoire dès qu’il se sera approvisionné (pas de date). J’ai aussi sollicité O Phantaly pour qu’il puisse faire pression sur les directeurs d’hôpitaux. Enfin, il semble qu’il y ait une possibilité de production locale (Factory 2 ? une unité de production locale de médicaments ?).

Un point important qu’il faudra résoudre est la désinfection de la sonde d’échographie. A la prochaine mission, il serait important de fournir les produits de désinfection adaptés.

Développement de l’analgésie péridurale

Il existe un désir fort de développer cette technique notamment dans le contexte obstétrical dans les 3 hôpitaux : Mittapha, Mahosost et l’hôpital mère et enfant. J’insiste sur l’importance de sécuriser l’environnement et notamment sur le fait d’avoir un monitorage présent constamment, une équipe formée et bien sûr la disponibilité d’un MAR pour encadrer cette analgésie.

Pour Mittaphab, Photyvanh me fait visiter en présence du chef de service  d’obstétrique la salle de travail et le bloc obstétrical. Cette zone est démunie en tout. D’ailleurs, ils m’expliquent notamment que les césariennes ne se font pas dans ce bloc mais dans celui de digestif mieux équipé. Lors de la discussion, j’apprends que du fait de la difficulté d’avoir une présence anesthésique notamment en garde, ce sont les obstétriciens qui réalisent les sédations pour les révisions utérines (Dolosal……). Enfin, il n’y a que 2 sages-femmes non seulement pour la salle de travail mais pour l’ensemble du service d’obstétrique et de gynécologie. Dans ces conditions, je leur ai expliqué qu’il n’était pas raisonnable de développer l’analgésie péridurale. Malgré leurs déceptions (et notamment celle marquée de l’obstétricien), ils étaient assez en accord avec cette conclusion. Le directeur de Mittaphab lors de ma rencontre a insisté sur l’importance de ce projet, je lui ai répondu que l’acquisition du SHA ainsi que la création d’une salle de réveil digne de ce nom me semblaient  plus prioritaires ….

Nous avons ensuite visité la maternité de Mahosot qui n’a rien à voir avec celle de Mittaphab : bloc de césarienne équipé contigu à la salle de travail, SSPI de 2 postes équipés pour chacun d’un moniteur et présence des MAR lors des situations difficiles. Le projet de développement semble plus raisonnable mais aucun MAR actuellement n’est formé spécifiquement à la pratique de l’APD.

Autres points

  • développement de consultations préanesthésiques à Mittaphab. En effet, depuis 2 semaines tous les après-midis, l’équipe d’anesthésie voit en consultation les patients programmés. Cette belle nouveauté fait suite à un décès impromptu au bloc opératoire suite à une rachinaesthésie chez un patient qui n’avait pas été évalué préalablement.
  • Création d’un conseil de bloc (avec une charte de fonctionnement) à Mittaphab sous l’impulsion du travail de Quentin Mouronval
  • Sédation pour la réalisation des ALR. Photyvanh utilise assez fréquemment une sédation soit de l’Hypnovel et/ou kétamine mais sans adapter les doses. Pour une patiente de 95 ans (50 kg), administration de 2 mg d’Hypnovel avec bien sûr à la clé une apnée sans surveillance spécifique postopératoire. Pour un enfant de 10 ans (25 kg), administration d’Hypnovel 1,5mg et 20 mg de kétamine. Nous avons revu ses protocoles permettant de diminuer nettement les doses (enfant 11 ans 25 kg, 0,5 mg d’Hypnovel et 10 mg de kétamine avec le même résultat clinique pour le confort de réalisation de l’ALR).
  • Développement de l’analgésie périneurale

En conclusion

Très belle mission avec ces nouveaux étudiants très prometteurs (surtout ceux de Mahosot).  La formation pour ces derniers doit être absolument poursuivie pour arriver à un standard de connaissance suffisant pour autonomiser et donc développer l’ALR à Mahosot et à l’hôpital mère et enfant. Phothivanh a une maitrise totale de la pratique de l’ALR permettant un appui pédagogique sur place (je n’ai pas vu Viengsavanh au bloc).

Prochaines missions :

  • Garder la pression sur les mesures d’asepsie
  • Ramener les solutions adaptées à la désinfection de la sonde et de l’échographe
  • Ramener des aiguilles spécifiques pour faire des tap blocs
  • Ramener une lampe pour le vidéoprojeteur de Phothivanh qui permet de faire les enseignements

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